Critique Cinéma - Dallas Buyers Club (Jean-Marc Vallée)

Publié le 16 Février 2014

Crédits photo : © images tirées du film

Crédits photo : © images tirées du film

Depuis 2012, Matthew McConaughey met en émoi le monde du cinéma. Après avoir multiplié les rôles anecdotiques dans des productions plutôt médiocres qui se basaient plus sur son physique avantageux que sur son talent d'acteur, il effectue un virage à 180° en enchainant les rôles brillants sous les ordres de quelques uns des réalisateurs les plus talentueux qui soient (Jeff Nichols, Martin Scorsese, Steven Soderberg...). La surprise fut telle qu'on parla presque de renaissance, de seconde carrière, pour qualifier ce changement soudain. En effet, qui aurait pu croire que ce Texan d'origine mettrait un jour le 7ème Art à ses pieds avec des films comme Magic Mike, Killer Joe ou MudCette année, dans Dallas Buyers Club de Jean-Marc Vallée, il atteint des sommets comme en témoignent ses nombreuses récompenses et son statut de grand favori dans la course à l'Oscar du Meilleur acteur. 

Critique Cinéma - Dallas Buyers Club (Jean-Marc Vallée)

Il incarne ici Ron Woodroof, un cow-boy homophobe qui, à la suite d'une vie d'excès en tout genre, se retrouve infecté par le virus du sida. Il lui reste alors seulement 30 jours à vivre. Indigné par l'inefficacité des traitements autorisés aux Etats-Unis et l'inaction de la FDA (Food and Drug Administration), il décide alors d'importer des médicaments alternatifs prohibés mais aux effets thérapeutiques vérifiés et sa rencontre avec Rayon, transsexuel également infecté, le poussera à étendre son commerce avec la création du Dallas Buyers Club.

Dallas Buyers Club faisait partie de mes films les plus attendus de 2014, en grande partie pour Matthew McConaughey qui n'a cessé de m'épater depuis Mud jusqu'à la très récente True Detective, nouvelle pépite de HBO où il joue assurément son rôle le plus torturé. Ici, il est on ne peut plus amaigri, habillé comme un Texas ranger débraillé et mâche la quasi-totalité de ses mots mais est en même temps absolument magistral car, peut importe ses rôles, il dégage toujours un charisme ravageur, même le visage creusé par la maladie. Au-delà de la transformation physique impressionnante, son personnage de Ron Woodroof est intéressant de par l'évolution de son comportement en parallèle de celle du VIH. Au tout début, on pensera être tombé sur la pire des crapules homophobes à chapeau qui soit, puis on le regarde lentement succomber au désespoir et à la colère avant de retrouver une sorte de nouvelle vie aux côtés de Rayon, transsexuel également infecté par le VIH (interprété par le talentueux Jared Leto que tout le monde connaît grâce à ses rôles dans Requiem for a Dream et Lord of War ou pour son groupe de musique 30 Seconds to Mars) avec qui il s'associera pour monter son club d'auto-médication. Egalement transformé physiquement (perte de poids et changement de genre), Jared est méconnaissable et incarne son personnage maniéré à outrance avec une rare intensité. Et c'est avec une certaine émotion qu'on contemplera ces deux personnalités totalement opposées se rapprocher pour lutter ensemble contre leur fléau commun. Car Dallas Buyers Club, avant de retracer fidèlement une histoire vraie, est une véritable fable sur la tolérance, l'acceptation et l'entraide.

Bien-sûr, le caractère atypique des deux héros et leur absence de passé clairement dévoilé (à part pour Rayon dans une scène de retrouvaille familiale) ne permettent pas de réellement les cerner et s'identifier à eux mais suscite néanmoins une profonde affection. De mon point de vue, ce défaut qui n'en est pas un permet de garder une vision d'ensemble du film tout en restant assez proches des personnages pour ne pas tomber dans un académisme qui serait mal adapté ici. Ils sont totalement au service de l'histoire qui se devait d'être révélée à nouveau aujourd'hui à la vue de l'impact qu'elle a eu à l'époque.

Nous sommes donc au milieu des années 80, en plein dans la pandémie qui s'est développée depuis la fin des années 70. A cette période, la FDA n'avait autorisé qu'un seul médicament antirétroviral : l'AZT, dont l'efficacité laissait à désirer. Ce laxisme des autorités de la santé ont conduis les malades à se soigner eux-même avec l'ouverture de clubs délivrant des médicaments alternatifs contre une somme mensuelle. Cette période est parfaitement bien mise en scène en se concentrant sur la personne de Ron Woodroof et plus particulièrement sur les sensations physiques ressenties dues à la maladie. L'environnement sonore sera souvent troublé par de terribles acouphènes, accompagné par les palpitations de son cœur. Cela permet d'accentuer l'immersion dans le côté intimiste mais pas trop du film abordé précédemment.

Dallas Buyers Club est donc un excellent film et un concurrent de choix dans la course aux Oscars surtout dans les catégories Meilleur acteur et Meilleur second rôle masculin. Il dispose d'un matériau de base, cette histoire vraie, de qualité et d'une mise en scène soignée et très immersive.

Rédigé par Ronan SAUVAGE

Publié dans #Critique cinéma

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